La culture : mère de notre ignorance
La culture, au-delà de son intérêt social, artistique, historique, ou du plaisir qu’elle peut procurer, permet-elle réellement de sortir de l’ignorance ? N’est-elle pas au contraire un nid à idées reçues, à préjugés, un formatage de l’esprit ?
La compréhension de notre réalité n’est-elle pas plutôt à trouver dans l’analyse des faits, l’observation de soi et des autres, de notre rapport à nous-même et aux autres ; libéré•es de nos bien futiles limitations culturelles ?
Les débats télévisés, les pamphlets, les avis des uns et des autres permettent-il vraiment de réfléchir de façon propre ? Ils sont l’expression de la pensée de l’autre et je ne suis pas sûre que cette pensée-là (si elle n’est pas réductible au simple divertissement), permette de développer une compréhension réelle, c’est-à-dire intime.
Un enfant comme un adulte peut-il élaborer un raisonnement libre sur la base du discours d’une personne (intellectuel, guide spirituel, éducateur) qui délivre des « vérités », c’est-à-dire, soyons clair, qui endoctrine ? Je ne pense pas. Et le nombre de livres, de sermons, de conférences, l’amas de culture n’y changera rien.
Nous avons tous des racines, bien sûr. Savoir d’où l’on vient, nommer ses origines, c’est important oui. Connaître son histoire personnelle, familiale et celle de l’humanité, c’est primordial. (je parle ici des faits, et non des interprétations, des récits romanesques et des symboles qui y sont le plus souvent associés)
Savoir tout ça, oui. Mais s’y accrocher, s’y identifier, c’est la mise à mort de la pensée.
Un constat s’impose : en tant que référence identitaire, la culture à laquelle on appartient apporte bien des entraves et de la confusion. Car elle occulte toujours la réalité individuelle. Que nous apprend la culture occidentale du statut de la femme par exemple, de l’amour, de ce qui est juste pour soi, de ce que c’est que de vivre de manière authentique ?
La question serait plutôt : que nous impose-t-elle cette culture ? Sommes-nous réellement libres de nos choix ? À l’évidence, la même question se pose pour les cultures non-occidentales.
On nous dit que sans culture, on n’est rien. Mais, je ne suis pas ma culture, pas plus que je ne suis ma nationalité, mon orientation sexuelle ou mon métier. Personne n’est ça ! Le conditionnement de la culture peut sembler porteur, mais il n’est qu’une béquille. Et comment marcher droit, sauter librement ou courir avec des béquilles ?
Encore une fois, au-delà du plaisir que l’on peut ressentir à admirer une œuvre ou à découvrir une pensée, au-delà des informations que l’on peut y trouver sur notre passé, la culture prise pour modèle, pour repère, pour définition de soi ou d’une société mène à la destruction. L’état psychique de notre espèce et nos perpétuelles guerres en sont le résultat.
Aucun érudit, aucun intellectuel, aucun défenseur de la culture comme recours contre l’obscurantisme n’a jamais empêché la tragédie qui se rejoue sous nos yeux siècle après siècle.
Savoir questionner sa culture pour la mettre à distance (et non la cultiver donc) est une démarche salutaire. Parce que c’est un chemin vers soi, vers la connaissance de sa psyché, de notre pensée individuelle et collective ; celle-là même qui façonne notre monde.
Allez ! On les enlève ces béquilles ?
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